En tant qu’hôtelier, nous sommes amenés à travailler avec de nombreux intermédiaires, notamment pour la commercialisation de nos hébergements. Parmi les intermédiaires existants ( appelés OTA : Online Travel Agency), les plus importants sont Expedia, Airbnb, et surtout Booking. Il n’est pas rare que Booking « apporte » plus de 50% du CA d’un hôtel. Garder un équilibre commercial et un pouvoir de négociation est alors mission quasi impossible pour les hoteliers. D’autant plus que toutes ces plateformes ont avant tout été pensées pour satisfaire (et séduire) les clients, c’est-à-dire les voyageurs, et non pas pour protéger les hébergeurs (« partenaires » comme Booking nous qualifie) !
Pour illustrer cette cohabitation, voici 2 exemples récents de problèmes rencontrés lors de réservations avec Booking, et comment cela a été géré :
BOOKING.COM : PLATEFORME PReFEREE DES ESCROCS ?
Nous recevons le 1er Décembre une réservation de 7 nuits d’un client russe, à partir du 20 Décembre. Nous rentrons en contact avec lui via la messagerie Booking pour lui donner les premières informations concernant sa réservation. Ce à quoi le client nous demande notre adresse mail, que nous lui fournissons. Nous recevons dans la foulée un email, qui attire tout de suite notre attention. Une histoire de personne âgée, de compte utilisé par son fils, qui aimerait faire un plan d’accès à l’appartement pour son père et souhaiterait que nous le validions… Et là, un lien frauduleux avec un fichier à télécharger depuis une plateforme d’échange
Nous contactons le support Booking sur le champ pour leur signaler la tentative de piratage. Dans le même temps, nous indiquons au client que nous avons identifié sa manœuvre et que Booking en est informé. Plus aucune nouvelle du client, qui ne nous répond plus, mais conserve sa réservation. Booking nous dit que le dossier est transféré au département sécurité. Il faut rappeler que la réservation était alors annulable sans frais (jusqu’à 4j avant l’arrivée pour ce type de réservation), et qu’il était dans notre intérêt de l’annuler au plus tôt pour pouvoir libérer notre planning et avoir une chance de louer l’appartement en question.
S’en suivent 16 jours de relance de notre part auprès du support Booking, sans solution apportée ni action de leur part. Lors d’un dernier appel au support, nous leur indiquons que nous allons annuler la réservation, parce qu’il est clair qu’aucun client ne se présentera et que nous ne serons jamais payés. Malheureusement, tout hébergeur est tenu de respecter les conditions de Booking, et dans ce cas de figure, le support me l’a bien rappelé en m’informant que l’annulation pouvait m’être préjudiciable : nous pourrions avoir à reloger ce client (ou un autre client proposé par Booking car il s’agissait d’une réservation « garantie par Booking » qui peut trouver un client de remplacement en cas d’annulation tardive), et cela à nos frais.
Au final, le client ne s’est pas présenté, nous n’avons pas été payés, n’avons pas pu relouer notre appartement, et Booking refuse de nous indemniser. Par ailleurs, nous n’avons jamais été recontactés par l’équipe Sécurité.
Note :
Nous avons reçu 2 nouvelles tentatives similaires de piratage en ce début d’année, et avons dû à nouveau multiplier les appels au support pour cette fois-ci obtenir l’annulation des réservations, (au bout de quelques semaines tout de même !). Peut-être que Booking commence enfin à prendre la mesure du problème, étant donné la recrudescence des tentatives de piratage provenant de leur plateforme, comme semble l’indiquer un récent article de La Voix Du Nord
BIENVENUE DANS L’UNIVERS IMPITOYABLE DE BOOKING.COM
Le second exemple concerne le délicat sujet des commentaires clients. On le sait, les commentaires / notes attribuées par les clients à la suite de leur séjour sont vitaux pour notre activité. Et certains clients le savent bien. Par moment, la menace d’un mauvais commentaire est utilisée pour demander une remise, ou un surclassement. Pour d’autres clients d’humeur plus sympathique, c’est la promesse d’un bon commentaire qui est utilisée ! Pour mettre de l’ordre dans tout ça et éviter les dérives, Booking est là pour réguler ces commentaires« douteux » !
Ici, il s’agit d’un client qui avait réservé dans notre établissement « Le Chat Qui Dort – Vieux Lille II », notre studio « Le Foch » (notre appartement le moins cher). Nous avions pris contact avec le client avant son arrivée et toutes les informations d’accès à l’appartement lui avaient été communiquées.
Le jour du check-in, le client nous appelle en nous indiquant ne pas arriver à rentrer dans son appartement. Après prise de renseignements, le client se trouvait dans un autre de nos établissement « Le Chat Qui Dort – Suites », notre établissement le plus luxueux (et le plus cher). Pas bien grave, les 2 établissement sont distants d’un km environ. Nous lui indiquons comment se rendre dans son appartement.
Il refuse et nous indique avoir réservé dans l’établissement « Suites », et souhaite y être hébergé. Malheureusement nous étions déjà complets dans cet établissement. S’en suivent des appels (du client et de nous même) auprès du support Booking, sans qu’aucune solution ne se dessine. Bien entendu nous étions dans notre bon droit.
Finalement, le client n’a pas séjourné dans son appartement, ce que nous avons dès le lendemain confirmé auprès de Booking (« No Show »). Et quelques jours plus tard, nous avons vu apparaitre le commentaire client ci-dessus.
Nous demandons alors la suppression du commentaire, au motif que le client n’avait pas séjourné (motif légitime, mais surtout faisant parti des motifs valables pour demander la suppression d’un commentaire). Réponse de Booking : refusé. Impossible d’avoir le motif du refus. Ils nous indiquent juste qu’il est toujours bien d’avoir aussi des commentaires négatifs, que cela rend notre notation crédible, et que nous devrions juste y apporter une réponse ! La demande a été soumise au support Booking à plus de 3 reprises, nous avons fourni les preuves que personne n’avait jamais accédé à l’appartement pendant la période concernée (grâce à notre système de serrures connectées), mais la réponse a toujours été la même, sans explication.
Après une ultime requête, toujours refusée, nous avons enfin eu une justification
« Malheureusement, les directives de suppression des commentaires ont été mises à jour, et même la non-présentation n’est plus un motif de suppression des commentaires, étant donné que les clients ont partagé une partie de leur expérience liée à l’établissement tout en respectant les principes de suppression des commentaires. »
Booking.com Partner Support Team
Au-delà de la pertinence de cette nouvelle directive (comment juger d’un appartement moche et sale sans y avoir séjourné… ?), la chose à noter est qu’ici on nous refuse la suppression d’un commentaire datant d’Octobre 2022, au motif de directives mises en place mi-Janvier 2023 !
Mais c’est bien Booking qui impose ses règles et a le dernier mot !